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Adéquation entre l’offre de formation et les besoins en compétences des entreprises de l’interindustrie en Nouvelle-Aquitaine

Nouvelle-Aquitaine : 37.000 recrutements à prévoir dans l’industrie d’ici 2028

Les entreprises industrielles de Nouvelle-Aquitaine sont optimistes. Portées par des vents favorables, elles anticipent une progression de leur activité et une hausse de leurs effectifs. Entre les départs divers et les nouveaux postes à pourvoir, elles pourraient avoir à recruter environ 37.000 personnes d’ici 2028. Une bonne nouvelle pour l’économie de la région, mais surtout un défi colossal, pour des entreprises qui, aujourd’hui, déjà, peinent à recruter. Elles doivent, de plus, organiser la montée en compétences de leurs salariés en poste, pour réussir leurs transitions écologique, numérique, énergétique… Face à des besoins qui explosent, le système de formation pourra-t-il faire face ? Des réponses et des pistes d’actions dans l’étude dirigée par l’Observatoire Compétences Industries : « Adéquation entre l’offre de formation et les besoins en compétences des entreprises de l’interindustrie en Nouvelle-Aquitaine ».

Un défi colossal pour les services RH

Sueurs froides en vue dans les services de ressources humaines ! Les projections réalisées dans l’étude font état d’un besoin en recrutement de 37.000 salariés dans l’industrie en Nouvelle-Aquitaine d’ici 2028. Plus de la moitié de ces recrutements seraient dus à des hausses d’effectifs, le reste correspondant à des départs en retraite ou mouvements de main d’œuvre.

Dans les intentions d’embauche en 2023, les métiers traditionnels de l’industrie occupent le haut de l’affiche. Lorsqu’on leur demande sur quel métier elles envisagent de recruter, les entreprises citent d’abord celui d’usineur devant ceux de chaudronnier et soudeur. À horizon de 3 à 5 ans,  plus de 60% des entreprises industrielles affirment que leurs effectifs vont progresser dans les métiers de production comme conducteur d’équipement, technicien de production, ou régleur. Les niveaux sont les mêmes pour les familles de métiers « Méthodes d’industrialisation » et « Conception, études et R&D ». Des fonctions quantitativement moins importantes et néanmoins essentielles pour affronter les nouveaux défis de l’industrie. Les entreprises anticipent des besoins en compétences nouvelles pour optimiser les process, intégrer de nouveaux matériaux, repenser la conception des produits et les modes de production…

Les entreprises fermement décidées à augmenter leur effort de formation

Une majorité d’entreprises, 57%, envisagent d’accroître le budget consacré à la formation de leurs salariés contre 2% qui prévoient une diminution, les autres étant dans l’expectative ou le statu quo. Les formations en production industrielle sont plébiscitées : 38% les jugent très prioritaires, et 46% assez prioritaires. Les formations en lien avec la transition numérique et la modernisation de l’outil de production sont également au programme d’une majorité d’entreprises : 75% pour les formations en logiciels métiers, et 55% pour les formations en numérique et automatisation. En revanche, la transition écologique demeure un concept flou pour les entreprise. 25% des employeurs sont sensibilisés à la transition écologique sans être en mesure d’en donner une traduction concrète dans leur activité. 41% se limitent à des actions ponctuelles sans stratégie d’ensemble. L’examen des compétences clés identifiées dans l’étude « Impact de la transition écologique sur les métiers et les compétences de l’industrie » confirme cette impression. Par exemple, seuls 21% des répondants considèrent qu’il sera nécessaire de développer la maîtrise de l’éco-conception pour réduire l’impact environnemental des produits et seuls 9% y voient un besoin en formation. Les proportions sont équivalentes pour la question de la sensibilisation des opérateurs à l’optimisation des consommations (de matières premières ou d’énergie).

Des attentes insatisfaites sur les enjeux clés

Les entreprises industrielles restent sans doute plus préoccupées par l’acquisition des compétences correspondant à leur cœur de métier. Sur ce point, la formation initiale aux métiers industriels concentre toutes les critiques. Elle est considérée comme la principale cause de leurs difficultés de recrutement. 55% des entreprises la jugent quantitativement insuffisante. 63% la jugent inadaptée à leurs besoins. La formation continue échappe partiellement à l’insatisfaction. Sur les thématiques de la sécurité, du management, de la logistique ou de la gestion, plus de 80% des répondants jugent les formations adaptées. Cependant, 52% estiment que les formations en production industrielle ne répondent pas vraiment à leurs besoins. Et seule une courte majorité de répondants se satisfait des formations en logiciels métiers et ou en numérique et automatisation, pourtant cruciales pour les années à venir.

L’analyse de l’adéquation entre l’offre et les besoins de formation délivre une vision plus nuancée de la situation. D’abord, l’offre de formations initiale et continue aux métiers industriels semble assez importante. Chaque année ce sont 6.000 diplômés, de CAP à Licence pro qui arrivent sur le marché du travail. La répartition géographique des organismes apparaît globalement proportionnelle aux besoins de chaque territoire. L’examen détaillé de 23 métiers révèle cependant une inadéquation sur 11 métiers. Les disparités géographiques entre centres urbains et territoires ruraux sont notamment en cause. Par ailleurs, des métiers spécifiques à certaines branches professionnelles – loin d’être marginales – manquent de candidats qualifiés : conducteur de lignes papier carton, opérateur de matériaux composites, opérateur de fabrication chimie, menuisier industriel…  Enfin, des métiers industriels les plus recherchés – technicien de maintenance, conducteur d’équipement industriel, technicien d’usinage – connaissent des problèmes d’adéquation entre offre et demande, sur le plan de la qualité mais aussi de la quantité. Avec 65 formations initiales recensées, les besoins en conducteurs d’équipements industriels devraient être couverts ; mais les promotions ne sont pas remplies. Si les organismes de formation et les entreprises peinent parfois à se comprendre, ils ont une préoccupation commune qui pourrait les rapprocher : celle de l’attractivité.